Loïc Mondoloni
Directeur général de l'hôpital de Martigues
:
"Le virus continue à circuler de
façon
Extrêmement active"
Avec 61
patients hospitalisés pour Covid et un certain besoin d'oxygène, rien n'est
encore gagné... Le directeur général de l'hôpital Loïc Mondoloni fait le point
sur la situation sanitaire.
Quelle est la situation sur le
front du Covid ? Est-ce que ce troisième confinement fait vraiment baisser
l'épidémie ?
Si, à
l'échelle de la région Sud, on commence à avoir les premiers effets avec un
taux d'incidence qui s'est stabilisé, voire commence très légèrement à
s'infléchir, comme sur la courbe des hospitalisations, il y a des différences
importantes selon les départements. Dans les Bouches-du-Rhône, les données
continuent à monter. Aujourd'hui, on compte 61 patients hospitalisés pour
raison de Covid. Cela reste un plateau haut, parmi les plus hauts même que l'on
ait connu depuis les trois vagues. C'est surtout un plateau long dans la durée,
avec des évolutions dans la prise en charge entre l'hospitalisation dite
traditionnelle et les secteurs de réanimation où on est parfois à 10-11
patients et jusqu'à 20 personnes qui relèvent de soins critiques. Cela signifie
que le virus continue à circuler de façon extrêmement active et qu'il ne faut
pas baisser la garde en termes de respect des gestes barrières.
Quel est le portrait-robot des
patients admis à l'hôpital ces dernières semaines ?
On est sur
une moyenne d'âge de 65 ans sur le début de l'année au niveau des
hospitalisations avec 55 % d'hommes et même 65 % en réanimation. La moitié des
patients a moins de 65 ans.Le rajeunissement se confirme. On a toujours
autant de décès et devons faire face à des cas avec des troubles en termes de
détresse respiratoire et de nécessité d'oxygénation de patients.
Est-ce qu'en termes
d'organisation, les lignes ont bougé, notamment sur les capacités en
réanimation ?
Nous avons
12 lits de réanimation au total. On est passé de 6 lits dédiés à des cas Covid
à 11 aujourd'hui. Nous avons créé des lits dédiés à des patients en détresse
respiratoire, une dizaine hébergée dans d'autres secteurs d'hospitalisation.
Quel est l'impact sur
l'activité non Covid, poursuivez-vous les déprogrammations ?
Il y a
malgré tout un maintien de l'activité chirurgicale pour tout ce qui ne peut pas
être déprogrammé ou reprogrammé. La consigne de déprogrammation a été fixée par
l'Agence régionale de santé, on ajuste de façon hebdomadaire, cela représente
un taux de déprogrammation de 40 %, sous réserve de prendre en charge les
urgences, les cancers et les patients qui pourraient pâtir de perte de chances.
On a une mobilisation et une coordination entre les établissements
de santé, qu'ils soient publics ou privés, qui est à souligner. On s'est
rapproché des cliniques de Martigues et Marignane en particulier. Lorsque l'on
arrive à un certain seuil de saturation, on procède à un transfert de patients.
C'est un volume de 3 à 5 patients chaque semaine et une coopération avec le
privé dont on peut se réjouir.
Est-ce que vous avez une
cartographie des cas et plus de recul sur la question des variants ?
On reste
essentiellement, voire quasi exclusivement sur des cas de variant anglais.
Alors qu'une mutation fait
des ravages en Inde, doit-on s'inquiéter de ce nouveau variant ? En tout cas,
n'est-ce pas le rappel que cette épidémie reste difficile à cerner et
imprévisible ?
Il faut
rester vigilant à l'évolution de l'épidémie, mais encore une fois, on reste sur
le variant anglais aujourd'hui. L'incertitude relative à l'impact de la
transmission des variants impose de ne pas relâcher les efforts. Même si on est
vacciné et même si demain, l'État décide un assouplissement avec des réouvertures,
il faut maintenir une véritable vigilance et continuer respecter les gestes
barrières.
On reste dans les
Bouches-du-Rhône sur une marée haute, mais le gouvernement parle de rouvrir les
vannes de manière progressive. Est-ce tenable selon vous ?
Pour notre
département, cela reste tendu. Je ne cache pas que ce serait une inquiétude.
Aujourd'hui, la réouverture sur notre territoire ne me paraît pas adaptée vu
notre situation.
Quel est l'état des
troupes, on imagine que les besoins en remplacement ou en renfort sont un autre
enjeu après une lutte depuis plus d'un an ?
Le
sentiment général est la fatigue car l'attente est longue avant de voir la
courbe fléchir et les résultats concrets des mesures de freinage. La pression
physique et psychologique est importante, et il faut saluer une fois encore
tout l'investissement de la communauté médicale pour garder le cap dans cette
période inédite.
La seule solution de s'en
sortir, c'est de monter en puissance sur la vaccination ?
C'est une
lumière. On vit une situation paradoxale. Il y a d'un côté un volume important
de patients qui restent à prendre en charge avec des conditions techniques et
logistiques drastiques pour gérer les deux flux Covid et non-Covid. De l'autre,
nous avons notre Ehpad (établissement d'hébergement pour personnes âgées
dépendantes) du Vallon, où nous réfléchissons sur le monde d'après et les
protocoles pour envisager la réouverture progressive de la structure avec un
retour à la vie collective pour les résidents qui, pour la plupart, ont été
vaccinés avec les personnels soignants. On oscille entre une situation critique
en "médecine, chirurgie, obstétrique" (MCO) et l'Ehpad qui a passé le
cap de la vaccination et pour lequel on tend vers un retour presque normal de
ce que l'on connaissait avant. On a la preuve que la vaccination permet de
retrouver la vie. Même si, encore une fois, le temps des gestes barrières n'est
pas terminé !
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