Éoliennes en mer :

Dans les coulisses de Provence Grand Large à Fos

À Fos se construisent les immenses flotteurs de la ferme pilote qui doit voir le jour en 2023

Par Marguerite Dégez

C'est un jeu de Meccano géant. Des tubes en acier carbone d'1,50 m de diamètre, peints en jaune et gris. Transportés par grues dans les hangars immenses d'Eiffage métal, à Fos-sur-Mer. À quelques dizaines de mètre de là, les vagues viennent lécher le quai du site. Plus loin - on les aperçoit nettement depuis la route -, une rangée d'éoliennes terrestres hérissent la plaine industrielle.

Chez Eiffage, il s'agit aussi d'éoliennes, mais marines cette fois. Elles seront trois, flotteront au large de Port-Saint-Louis-du-Rhône, sur le site dit "de Faraman" et formeront ensemble la ferme pilote de Provence Grand Large. Elle devrait être opérationnelle en 2023 si EDF, aux commandes, tient son calendrier malgré des réticences locales.

L'énergéticien, lui, a déjà lancé le chantier. Chez Eiffage métal, donc, les trois flotteurs sont en cours d'assemblage, pièces soudées et pièces forgées, venues de Chine pour la plupart. Un travail de titan. Une fois achevé, chaque dispositif complet pèsera 3 000 tonnes, mais - miracle de la physique ! - flottera pour accueillir une turbine Siemens Gamesa de 8,4 MW culminant à 185 m de hauteur.

Une maquette à 1/33

Avant sa construction à taille réelle, le dispositif a été testé ; à l'entrée du hangar, une maquette à l'échelle 1/33 interpelle le (rare) visiteur. Elle a servi il y a quelques mois, aux essais d'équilibre, de résistance à la houle réalisés dans le bassin Océanide, à La Seyne-sur-Mer, explique Christine de Jouëtte, directrice du projet pour EDF.

Près de là, les équipes d'Eiffage assemblent la colonne centrale, les extrémités des flotteurs. Plus loin, entre le hangar et l'eau, une silhouette massive d'une dizaine de mètres de haut, aux airs de réacteur chimique, se dresse. Pièce centrale du flotteur, bardée d'échafaudages, le "coeur" du flotteur attend ses trois pieds.

À l'été prochain, chaque trépied flottant devra être chargé sur une barge grâce à des trains roulants permettant de le déplacer jusqu'au quai. La barge, une fois ballastée, sera conduite jusqu'au quai Gloria voisin pour y accueillir la turbine avant acheminement sur le site de Faraman. Là, les gigantesques moulins à vent seront ancrés par une centaine de mètres de profondeur, sous tension permanente afin de résister à la houle, au vent. Ces éoliennes d'un nouveau genre (une première en France) devraient, si elles tiennent leurs promesses, fournir de l'électricité à 45 000 habitants pour les vingt ans à venir.

Du démonstrateur à l'industrie

Pour EDF, qui fonde de grands espoirs sur cette technologie, Provence Grand Large ouvre surtout la voie à des fermes éoliennes offshore commerciales. Eiffage métal, qui avec la société SBM offshore (co-conceptrice du flotteur) opère le montage, réfléchit d'ailleurs à étendre son site fosséen sur une dizaine d'hectares mitoyens, afin de pouvoir monter simultanément plusieurs flotteurs. La ferme pilote provençale n'est pas encore sortie de mer, projet de longue haleine. Mais autour d'elle, c'est toute une filière qui voit grand, et large.

Le projet en chiffres

3 éoliennes prévues sur la ferme pilote de Provence Grand Large. Hautes de 185 m, dotées d'une envergure de 154 m.

25 mégawatts (MW) de capacité de production cumulée, de quoi alimenter 45 000 personnes en électricité. 19 km de câbles pour les raccorder.

Le site est à 17 km au large de Port-Saint-Louis-du-Rhône, et on compte une distance d'1 km entre chaque éolienne.

200 millions d'euros (M€), montant de l'investissement (dont 3,7 M€ pour la recherche, le suivi et l'acquisition des connaissances).