Les maires "dans le
flou"
Les élus de proximité restent en première ligne
et attendent des précisions
/ PHOTO SERGE GUÉROULT
Pour eux,
la journée d’hier fut agitée. Entre réunions et coups de téléphone incessants, les
maires étaient sur tous les fronts. Tous ont néanmoins réagi aux annonces
d’Emmanuel Macron, et au retour du
confinement, en
partageant les mêmes sentiments : l’incertitude, l’inquiétude et la nécessité de
défendre la chose publique.
◗ GABY
CHARROUX, MAIRE DE MARTIGUES
"Nous
sommes complètement dans le flou", commence Gaby
Charroux. Hier, le maire
de Martigues, à l’instar de tous les autres maires des communes voisines,
n’avait aucune indication de la préfecture. En attendant un éclaircissement sur
les mesures à appliquer, il se disait inquiet "sur l’apparence des choses
car sur l’aspect sanitaire je n’ai pas d’avis, il faudrait que je
sois épidémiologiste pour cela, mais ce qui ressort de l’annonce d’Emmanuel
Macron c’est que les mesures sanitaires sont insuffisantes et que
la situation est pire qu’au dernier confinement."
Il voit
d’un bon œil que les écoles, collèges et lycées soient épargnés car "il
est indispensable que nos enfants apprennent, ils doivent garder
un équilibre".
Mais
Gaby Charroux se dit très inquiet pour les petits commerces et constate,
exaspéré, qu’"encore une fois, les maires n’ont pas été
concertés. À croire que la concertation n’est pas dans la culture
de ce gouvernement."
◗ FRANÇOIS BERNARDINI, MAIRE D’ISTRES
"Nous
n’avons pas eu de grande surprise, on s’y attendait. Il faut maintenant être
conscient et il faut que cette nouvelle période de confinement serve à quelque
chose". Pour lui, cela passe "par une prise de conscience
de tous avec le respect des gestes barrières, le port du
masque,
la distanciation mais aussi le confinement". Mais aussi un
soutien renforcé. "Nous allons remettre en place, comme cela a été fait
en mars, les aides aux plus démunis et aux plus fragiles.
Nous
serons aussi aux côtés des commerces de proximité avec ce qui avait été fait,
des droits de place et des loyers qui ne seront pas revendiqués",
rassure François Bernardini.
Dans le
même temps, le maire n’autorisera pas la venue de forains non
alimentaires sur le marché. "Je n’ai pas envie d’afficher devant
ces commerces de centre-ville une espèce de concurrence déloyale. Je ne veux
pas qu’ils trouvent sous leurs yeux des forains qui vendent ce qu’ils proposent
habituellement alors qu’ils ont le rideau fermé. Le commerce alimentaire sera
lui possible".
S’il regrette "l’hibernation
de la vie sociale", pour François Bernardini "le
temps n’est pas à la contradiction, ni à la rébellion ni à la polémique.
Il faut
prendre la mesure de cette deuxième vague et j’appelle
à
l’union pour s’en sortir le plus vite possible".
◗ MAXIME
MARCHAND, MAIRE DE SAUSSET
"Monsieur
Macron a inventé le confinement sans confinement !", lance
Maxime Marchand, qui oscille entre railleries et incompréhension.
"Le problème c’est que la règle change tous les jours. On va savoir dimanche
à 22 h tout ce qu’il faut appliquer lundi matin, dès 8 h.
Mais de
toute façon, les gens ont toujours une excuse pour être dehors", craint
Maxime Marchand, persuadé que le confinement va se renforcer dans
quinze jours.
"Ce
matin les employés de mairie m’ont demandé "est-ce qu’on travaille ?"
Eh bien je ne sais pas, se désole-t-il. On n’est pas décisionnaire,
nous, les maires, on applique. Et quand j’ai demandé au préfet (hier matin)
il m’a répondu "je ne sais pas" Donc bon à un moment, il faut
qu’on sache quoi faire et quoi dire."
◗ VINCENT GOYET, MAIRE DE SAINT-MITRE
"Tous
les maires ont bien conscience qu’il y a une dégradation de la situation
sanitaire, assure Vincent Goyet, mais on regrette que du flou
reste. Une fois de plus on a l’impression que ce n’est pas préparé." Le
maire de Saint-Mitre regrette notamment le manque de préparation
pour
la rentrée scolaire, dès
lundi. "À quelle heure doit-on maintenir l’accueil l ? 7 heures ? Et à 10
heures pour la récréation? Et la cantine? On en saura plus après l’intervention
du Premier Ministre mais je regrette que les informations soient décalées et surtout
qu’on ne soit prévenu que seulement 24 heures avant."
Vincent Goyet assure que les
services municipaux fonctionneront normalement dès aujourd’hui,
le restaurant municipal, lui, s’arrête. "Maintenant se pose la
question de l’ouverture ou non des bibliothèques et médiathèques…"
◗ JEAN HETSCH, MAIRE DE FOS-SUR-MER
"On
a beaucoup plus de questions que de réponses !" s’exclame Jean
Hetsch, un peu désabusé.
Le maire
de Fos rit jaune. "Une fois de plus c’est débrouillez- vous,
alors oui comme l’a souligné le Président on a fait un excellent
travail au premier confinement… Mais tout seul !
On nous
a lâché cette chose, le confinement, sans mode d’emploi…" Depuis
l’annonce du re confinement, le maire de Fos reçoit
beaucoup d’appels de
commerçants qui s’inquiètent pour leur sort.
"Apparemment
la liste des commerces prioritaires s’est agrandie aux
magasins de bricolage. C’est bien si vous avez votre robinet à
changer en urgence, mais pour ceux qui vont acheter de la
peinture pour refaire la chambre du petit, non. Ce n’est pas
juste, ces magasins sont avantagés."
Avec
Noël qui approche à grand pas, Jean Hetsch ne cache pas son inquiétude : "on
nous dit de consommer local… Cherchez l’erreur !"
◗ LAURENT BELSOLA, MAIRE DE PORT-DE-BOUC
"Il
faut faire face à cette épidémie. J’ai notamment très peur
pour le
monde de la culture et les commerces…"Cette première réaction
de Laurent Belsola est
suivie d’un blanc, comme si l’élu était encore sonné par la nouvelle.
Mais en
quelques secondes, le maire retrouve son verbe, particulièrement remonté :
"J’essaye de ne pas regarder vers l’après. On ne va pas pouvoir
se confiner tous les six mois. La situation sanitaire actuelle est
la conséquence d’une mauvaise gestion, notamment des hôpitaux. L’Etat
doit leur consacrer un plan d’investissement massif et surtout
tenir ses promesses sur les nouveaux lits de réanimations et
respirateurs", pointe-t-il. Avant de lancer un appel aux citoyens :
"Les Français doivent prendre conscience qu’on ne peut
pas rester dans cette situation."
"C’était
attendu…, soupire Michel Illac, comme bon nombre de Français. Le
Président a été clair sur le confinement et ses raisons. Il
appartient maintenant à chacun de respecter les mesures."
Après
ces mots tout en sobriété, le premier magistrat ne pouvait
retenir une pointe de
regret : "Je pense au monde du spectacle et à la culture qui avaient
repris leurs activités dans de bonnes conditions d’accueil. On aurait pu les
laisser continuer."
Les dés
étant jetés, l’élu a pour objectif de maintenir au mieux le service
public : "Nous allons communiquer rapidement sur ce qui sera toujours
disponible. J’espère que des latitudes seront laissées aux maires pour des
services comme le périscolaire, la cantine, les bibliothèques municipales, les centres
de loisir…
Nous
attendons les précisions du gouvernement."
◗ R.-F.
CARPENTIER, MAIRE DE CARRY-LE-ROUET
"Je
pense que ce confinement est nécessaire. Le gouvernement a la franchise de
reconnaître que la situation est catastrophique. J’ai d’ailleurs une pensée
pour le personnel hospitalier et le
monde
médical". comme ses homologues, René-Francis Carpentier reste dans
l’attente des modalités d’application de ces nouvelles
mesures. "J’ai
passé beaucoup de temps au téléphone, la population a de nombreuses
interrogations". Elle semble néanmoins "résignée"
selon lui. "On essaie de faire au mieux pour la population et le marché
sera ouvert ce matin".
Eric Le Dissès, maire de Marignane:
"On
ne peut pas critiquer la décision de l’Etat. Personne en France ne saurait dire
ce qu’il ferait à sa place.
Ce que
je regrette en revanche, c’est cette communication en 3, voire 4 temps. Ça rend
notre organisation beaucoup plus difficile à mettre en place. La situation est grave.
Nous avons tous un proche qui a été touché par le virus.
Malheureusement,
il n’existe pas de décision miracle".
Loïc Gachon, maire de Vitrolles :
"C’est
une option que l’on savait sur la table. A Vitrolles, l’épidémie se propage
comme un incendie. Si le confinement a été efficace en mars, il faut
recommencer".
Face à
cette situation d’urgence, le maire enchaîne hier et aujourd’hui les réunions
de crise. "Nous avons encore 1000 questions sans réponses. Les textes, les
décrets et les arrêtés y répondront sûrement. D’ici là, il faut être efficace.
Et sauver ce qui peut être sauvé."
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