"On est prêt à passer
à l’acte pour le dépistage"
Au-delà de la consultation au centre Covid de Martigues,
le Dr Gérard Eddi veut lancer l’autre lutte
Le Docteur Gérard Eddi, coordinateur de l’unité Covid-19 au gymnase Pagnol,
rappelle "rester sur nos gardes maximales".
Il est né
comme un poste avancé dans la guerre sanitaire. Le centre de consultation
Covid-19 de Martigues, situé au gymnase Marcel Pagnol, à un jet de pierre de
l’hôpital, a ouvert ses portes le 31 mars.
Trois semaines
vitales, un renfort stratégique pour "soulager" le CHM, avec l’aide
la commune et géré par la médecine de ville, jusqu’à une réorganisation depuis
lundi. Des consultations ouvertes toujours 7 jours sur 7 mais à un rythme
moins soutenu, de 14 à 18 heures désormais, sur fond d’une certaine
"accalmie" dans la tragédie. Mais n’allez surtout pas croire que
c’est la fin dans la lutte contre un virus qui va continuer à circuler. Point
d’étape avec le Docteur Gérard Eddi, médecin généraliste et président de la
Communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) du Pays de Martigues
sur un centre qui veut prendre sa part dans le dépistage massif, l’autre clé de
voûte de la lutte…
"On
n’a pas tout saisi encore de la manière dont fonctionne ce virus. Il est
déconcertant pour la pensée rationnelle ".
❚ Le centre Covid de Martigues qui réduit la voilure en termes
d’amplitude horaire, comme à Istres, est-ce une bataille
gagnée dans la guerre, en tout cas une accalmie
dans la lutte contre le Covid-19 ?
On avait construit le centre Covid comme une digue
sur la vague épidémique. Au regard de ce que l’on a vu sur le Grand Est et
l’Ile de France, on s’attendait à subir cette vague.
A cette heure, on y a échappé même si la prudence
est de mise car on n’a pas tout saisi encore de la manière dont fonctionne ce
virus. Ce virus est assez déconcertant pour la pensée rationnelle, entre des
territoires qui ont subi des assauts assez violents et d’autres, comme nous,
qui avons été relativement épargnés. On a l’impression que l’on a passé un pic
mais la situation reste tendue. On compte quand même les morts.
❚ Quelle a été l’activité sur le centre Pagnol depuis son
lancement ?
Sur les trois semaines, c’est un peu moins de 200 patients.
C’est une belle démonstration de l’implication des professionnels de
ville. On a joué un rôle de suivi. On s’est en quelque sorte interposé entre la
ville et l’hôpital pour permettre une certaine sanctuarisation du service des
urgences, dont le rôle est de s’occuper des cas graves, tout en permettant aux
médecins de ville de travailler de manière sereine. C’est une contribution
plutôt utile et efficace des professionnels de ville dans la lutte contre la
pandémie.
❚ Ce centre s’est peut-être avéré
comme un maillon essentiel pour réguler le chaos…
On a
ordonné l’accès aux soins. C’est peut-être une expérience pour l’avenir. La preuve
d’une cohérence entre un système de ville et un monde hospitalier avec des
trajectoires et des mises sur des rails spécifiques selon les cas. On a ainsi une
ordonnance des moyens et de l’action.
Chacun a
son rôle et sa place avec une cohérence et une efficacité. C’est du gagnant-gagnant
pour tous les acteurs.
❚ L’accès aux masques a été un
combat. La médecine de ville a t-elle désormais les
la volonté et de l’implication des
professionnels de ville. On a joué un rôle de suivi. On s’est en quelque sorte
interposé entre la ville et l’hôpital pour permettre une certaine
sanctuarisation du service des urgences, dont le rôle est de s’occuper des cas
graves, tout en permettant aux médecins de ville de travailler de manière
sereine. C’est une contribution plutôt utile et efficace des professionnels de
ville dans la lutte contre la pandémie.
❚ Ce centre s’est peut-être avéré
comme un maillon essentiel pour réguler le chaos…
On a
ordonné l’accès aux soins. C’est peut-être une expérience pour l’avenir. La
preuve d’une cohérence entre un système de ville et un monde hospitalier avec
des trajectoires et des mises sur des
rails spécifiques selon
les cas.
On a
ainsi une ordonnance des moyens et de l’action. Chacun a son rôle et sa place
avec une cohérence et une efficacité. C’est du gagnant-gagnant pour tous les
acteurs.
❚ L’accès aux masques a été un
combat. La médecine de ville a t-elle désormais les masques en nombre suffisant
?
Ça été
très compliqué au départ, très tendu. Si j’ose la métaphore, on était un peu
dans un camp de naturiste, à poil !
Les
masques sont arrivés. Ce n’est pas encore la panacée, mais c’est mieux qu’avant.
Il y a eu un rattrapage. Maintenant, je rappelle que les centres Covid sont nés
de l’initiative des libéraux, c’est venu de la base et nos tutelles ont été au départ
dépassé.
risquent de prendre la vague à leur tour".
❚ Le nouveau défi est de réussir le déconfinement.
Quel regard avez-vous sur le cap fatidique du 11
mai et des annonces de l’exécutif ?
Pour le
moment, on ne sait pas grand-chose. Il y a des points qui méritent d’être
précisés. On a entendu la date du 11 mai, du déconfinement progressif, région
par région, du relais des collectivités. Pour le moment, très sagement, on
attend. On n’est pas en train d’enfiler les pantoufles pour rentrer à la maison.
On continue le combat.
❚ Une des clés de ce déconfinement
est le dépistage massif pour repérer et isoler les nouveaux cas. Est-ce qu’un
centre comme celui de Pagnol n’a justement pas un rôle à jouer ?
On
milite pour ça. Les laboratoires de ville risquent de prendre la vague à leur tour.
Dans leur configuration de leurs locaux, c’est juste impossible. On attend les
ordres des préfets de santé. Il y a des choses à ordonner. On est dans
l’attente. On a une place adaptée. Dans un gymnase, on peut organiser cinq ou
six files en peu de temps. On peut procéder à une centaine de tests par jour
sans problème. N’avons-nous pas les missions de prévention et de dépistages à
la base ?
On est prêt à passer à
l’acte, on est capable de le faire".
❚ C’est un appel du pied à l’ARS,
notamment, pour un agrément pour le dépistage?
On attend
les ordres mais, dès aujourd’hui, on attaque les formations des infirmières pour
qu’elles puissent pratiquer les prélèvements. 80 personnes vont être formées.
❚ On va devoir vivre avec le
virus, a déclaré le Premier ministre dimanche… Est-ce que l’on peut craindre
une deuxième vague post-confinement ?
On
apprend de cette pandémie chaque jour. Il faut avoir beaucoup d’humilité.
Ce virus
nous rappelle à l’ordre, avec des schémas et un comportement viral différents selon
les pays. La clé est de verrouiller
l’immunité collective. En
attendant un vaccin, il y a beaucoup d’inconnues.
La
crainte est bien là. Il faut observer ce déconfinement avec attention. Ce virus
est violent, on va rester sur nos gardes maximales. On est content que moins de
gens rentrent en réanimation.
Jusqu’au
11 mai, on aura de nouveaux éléments pour nous orienter mais la position est la
prudence. Il y a une montagne à soulever pour régler l’histoire du
déconfinement. On n’est, selon moi, pas sorti
de cette situation avant
novembre. Il faut être extrêmement prudent.
Pascal STELLA
pstella@laprovence.com
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