Commercialiser
les crabes bleus
faute
de pouvoir les réguler
Exposé sur le marché aux poissons du Vieux-Port vendredi
dernier, le crabe bleu a colonisé l’étang cet été. À Berre, un vent de
panique semble avoir balayé la profession. À quand sa commercialisation ?
Entre avril et juin,
j’avais pêché deux crabes bleus dans l’étang. À la demande du Groupement
d’intérêt public pour la réhabilitation de l’étang de Berre (Gipreb) de Berre,
nous avons lancé les filets pour une campagne de prévention et constaté il y a
48h, une véritable catastrophe écologique. Jusqu’à 40 kg dans un
filet ! », s’exclame Franck Roman, pêcheur professionnel
d’anguilles sur l’étang de Berre. « C’est préhistorique, ils ont
des pinces à vous couper un doigt avec une carapace très dure, des pics de
partout, une véritable arme de guerre. Ils découpent les poissons, les
filets... rien ne leur résiste », poursuit-il encore incrédule.
Le pêcheur espère que la vitesse supérieure va vite être
enclenchée : « C’est tout un écosystème qui est en
jeu. »
Christian Qui est un chef cuisinier marseillais engagé
dans le domaine de la cuisine marine durable. Le crabe bleu, il l’a rencontré
il y a quelques années en Tunisie déjà bien installé sur les îles
Kerkennah : « Là-bas, ils les appellent Daesh car ils
détruisent tous les fonds marins. Ils se reproduisent très vite et dévorent
tout ce qui passe. On ne lui connaît pas de prédateurs à part l’homme et le
poulpe. » Son nom latin est Callinectes sapidus (étymologiquement
« bon nageur savoureux »). Bonne nouvelle, il est comestible. Sa
prolifération quant à elle, semble inéluctable. « Je les ai
observés sous l’eau en Tunisie, ils ont des ailettes sur les pattes qui leur
permettent de se déplacer très vite, de faire de grands bonds », confirme
Christian Qui.
Créer une nouvelle filière
Le
Gipreb connaît bien le fléau qu’est cette espèce. Son directeur,
Raphaël Grisel, témoigne : « Nous bénéficions de l’expérience
des autres lagunes méditerranéennes comme Thau en Occitanie, en Corse ou en
Tunisie. En octobre, lors des premières prises dans les filets, nous avons pu
mettre en place une démarche de régulation scientifique grâce à l’obtention
d’un fonds vert (fonds européen) spécialisé dans la protection de la
biodiversité. Nous avons pu financer les pêcheurs pour faire une étude afin
d’en savoir un peu plus sur cette espèce invasive. Soit localiser ce crabe et
connaître les techniques de pêches les plus efficaces. On parle de pêche
expérimentale. » Les crabes sont ensuite récupérés, mesurés,
identifiés (mâles ou femelles.) Certains d’entre eux seront ensuite marqués par
des balises acoustiques comme pour les poissons « pour voir s’il a
des échanges avec la Méditerranée et les autres lagunes ». La
chaleur de l’eau cet été a fait bondir le nombre de crabes. Si la pêche semble
le meilleur moyen de le réguler, il reste à pouvoir le commercialiser.
Rajoutant : « La filière n’existe pas. C’est le travail qui
nous attend, il faut mettre en place les choses pour pouvoir le consommer et
exploiter sa chair qui est savoureuse. »
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