VENDREDI 28/08/2020 à 10H53 - Mis à jour à 13H10
Coronavirus - Martigues : de la sueur et des larmes
au labo
Les biologistes se démènent pour encaisser
le choc de la demande de dépistage à Amavet,entre impatience et déraison...
Par Pascal Stella
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Ça défile tous les jours à Amavet et c'est embouteillé ! Si on a ouvert les vannes sans rendez-vous, on regrette un effet pervers du test massif avec des gens qui viennent sans avoir des symptômes ni être un cas contact
Je n'ai jamais connu ça en 30 ans de carrière !" Le docteur Jean-Pierre Arzouni, médecin biologiste au sein de Labosud du côté d'Amavet, ne cache pas une "situation exceptionnelle". Un temps hors norme aux portes de son laboratoire et sur le fil du rasoir, comme un nouvel effet de la crise liée au Coronavirus.
Ici, c'est la fièvre des tests Covid, comme dans bon nombre de laboratoires privés, flirtant avec une crise de nerfs aussi parfois, on va y venir, dans ce centre qui centralise presque le tout Martigues pour l'heure, avec l'hôpital. À un jet de pierre de la clinique, les patients défilent. Une file d'attente qui s'allonge sur le trottoir.
Depuis 25 juillet, le gouvernement a annoncé que n'importe qui pouvait désormais se présenter dans un laboratoire pour subir un test PCR (avec prélèvement naso-pharyngé). Un dépistage accessible gratuitement et sans ordonnance, en tout cas couvert par l'assurance maladie. Comme une traînée de poudre, dans le labo d'Amavet qui propose un service de prélèvement sans rendez-vous, sur le créneau de 9 h à 17h30, le nombre de patients explose. "300 tests par jour", pointe Jean-Pierre Arzouni. Au point de devenir une course sans fin avec des problématiques de flux tendus aussi voire le risque d'un manque de réactifs ou des écouvillons de prélèvement !
"Les délais des résultats qui se creusent"
Comme un syndrome de l'IHU du professeur Raoult, on fait la queue. Côté pile, une bonne chose parce que se faire dépister c'est la clé de la lutte (comme les gestes barrières...) contre le Coronavirus. Oui, mais voilà, ça crée un sacré embouteillage, avec, côté face, un effet pervers du "test massif". "On a été pris de court devant le volume de demandes, avoue le biologique, même si le laboratoire se met en quatre. "On se retrouve en porte à faux. Pris à partie parfois par des gens qui en ont besoin pour un voyage ou une opération".
"On a une capacité de test de 1800 analyses par jour, alors que l'on tourne autour 2 200 tests au quotidien sur le réseau Labo sud. On creuse les délais", se désole le directeur d'Amavet. De 24h, on est passé à 48 h puis même 72 heures et même au-delà parfois. Comme le serpent qui se mord la queue, avec un taux de positivité autour de 5 ou 6 % (un ratio de 120 cas avérés sur 1 800), là où on était à 0,6 % à la sortie du confinement, soit dit en passant. Ce qui doit inciter à la vigilance au-delà du port du masque qui s'impose plus que jamais. Comme la raison...
Dans les files d'attente, il y a ceux qui ont été en contact avec une personne positive, des voyageurs obligés de fournir un résultat négatif datant de 48 h maximum. Sans ordonnance, pas de distinction, avec ceux qui viennent sans vraie raison, parce qu'"ils ont vu de la lumière" en exagérant à peine, en tout cas juste pour se rassurer. "On a vu des gens qui viennent se faire tester 2 ou 3 fois", souffle une technicienne de laboratoire. Comme une déraison au détriment des patients en ayant le plus besoin ! "On se retrouve avec une surtension dans la gestion Covid et une médecine hors Covid qui en pâtit avec des patients qui ont peur de venir !" analyse Jean-Pierre Arzouni. "Les personnes, sans signe clinique, n'ont que peu d'intérêt à savoir s'ils ont rencontré le virus face aux urgences cliniques et dépistage pré-opératoire."
Reste que la réalité est là, une course sans fin qui génère de vives tensions matérielles et humaines aussi. On avoue des pleurs chez les secrétaires, tiraillées entre des gens parfois agressifs et un téléphone qui s'agite frénétiquement, tout en jonglant avec l'accueil et en conciliant l'activité traditionnelle du labo.
Le symbole d'un stress ambiant et une panique chez certains dans la ville. "Il y a un grand désordre dans les esprits, décrypte le docteur Gérard Eddi. Un climat "insecure". On arrive à un seuil de frustration des gens aussi face à la complexité virologique alors que la société est habituée à trouver des solutions facilement".
Du calme !
"Il y a une pression, des personnels au front depuis mars, fatigués par la première vague. On essaie de répondre à un été de folie, prolonge M. Arzouni. C'est stressant, on a toujours peur de passer à côté d'un cas positif ou un patient qui doit être hospitalisé". Car au-delà des retards, que l'on espère "rattraper d'ici la fin de semaine", on ne chôme pas. "On a fait une augmentation de la production en équipement avec un 4e automate d'ici la semaine prochaine (machine d'analyse), nous avons embauché 17 CDD depuis le début de la crise en mars sur notre réseau. On a élargi les amplitudes horaires. Aujourd'hui, le plateau technique travaille de 7 h jusqu'à minuit, avec des dépistages le samedi et le dimanche".
Tester et encore tester, a martelé les autorités. Amavet le fait ! Et si on annonce une offre qui devrait se décliner au Grès et à Martigues Nord (Auchan), il y a tous les signes que la situation est sacrément tendue. Après la faillite des masques en mars, le dépistage c'est pas gagné. Si l'ARS a déjà prévu "une priorisation des tests" selon les cas, il va falloir le dire à ceux qui font la queue... Une certaine mesure et le calme dans les rangs rendraient service à tout le monde...
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